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Publié le par Juliette Mézenc

Elle marche sa croupe chaloupe sous les eaux salées. Les vagues en bâillant frôlent son cuir chevelu et puis moutonnent superbement, lui font une coiffe comme autrefois. Eurynomée des profondeurs. Chiara ondule sans se soucier, ses hanches blanches frayent un sillon, dieu que c’est bon. Les poissons volants tournent sans répit around, c’est leur godess, leur princesse aux pieds zélés, aussi décrivent-ils de larges boucles ciel mer ciel mer autour de celle viva qui s’affranchit mieux que quiconque bravissimo des éléments fort contraignants. Ils la badent ils l’encensent lui baisent les pieds : des fils de pêche en nylon transparent enserrent les mignons appendices, lui font la sandale ailée et quasi invisible ; seul le talon aiguille atteste sa présence. Chiara savoure et puis descend. Croise une chimère au corps bien nu. Salue. Elle se rappelle  les chaluts remontent jusqu’à cent chimères mais le poisson ne présente pas d’intérêt industriel. Un ange de mer un peu plus loin la considère d’son œil sévère de gros pépère. Elle l’envoie paître d’une chiquenaude bien sentie dans la nageoire. Pas impressionnée, elle a décidé, par les barbons les gras d’l’égo les A ta place les bons censeurs. Elle descend. Le corail s’annonce déroule tapis tapisse relief de son poil dur, libère anémones et crustacés en farandole. Tous l’entourent conciliabules. Les eaux se peuplent de pipelettes. Les eaux se troublent de la présence de tous ces êtres quêtant amour. Les eaux rougissent de l’attitude très naturelle des grandes lamproies, celles de Wagner, qui profitent de la situation pour aspirer la chair le sang d’infortunés qui se trouvent à portée de sa ventouse buccale. Sa petite dent obtuse fait des ravages. Peu s’en soucient. Un de perdu dix de retrouvés chantent en chœur les planctons célébrant vie recyclage dans les parages. Dévoration copulation permutation Tout doit disparaître Place messieurs Place au suivant ! Les conversations vont bon train autour de Chiara qui s’amollit imite méduse se gélifie se poissifie, en un mot s’abandonne aux flux marins. La scène se déroule à l’ombre des jeunes raies de mer. Le tout glougloute affreusement gloutonnement ça suce aspire se contorsionne, attire Chiara toujours plus bas vers les bas-fonds.

Derrière les branches rouges des grandes gorgones, dans les blue holes les plus blue se trouve tapi kraken aux mille ventouses. Attend son heure. N’est pas pressé.

Un escadron de torpilles marbrées intervient à point nommé, disperse beau monde, assomme manu militari poissons récalcitrants à l’éparpillement, somme Chiara de circuler Y’a rien à voir Qu’est-ce t’as Poupée t’es mal lunée ? Elle s’empresse remonte en hâte somnambulique. A la surface, un poisson lune se fait langoureusement bercer par la houle. Tout est calme. La lune brasille la mer en silence.  

Femme côté nord

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